Vous trouverez ci-dessous un document d’amorçage de la réflexion sur ce sujet. N’hésitez pas à le télécharger (liens en fin de texte) puis à me le retourner annoté, modifié ou complété sur la boîte richarddomps@gmail.com Je ferai ensuite une synthèse de ces retours, qui sera soumise à la réflexion du groupe de travail qui se sera constitué sur ce thème.

Richard Domps, animateur du thème.


Plan du document

3.4.1 – Présentation du contexte géographique

3.4.2 – la navette à grande vitesse

3.4.3 – Impact sur l’urbanisation locale

3.4.4 – Impact sur la vie locale et l’activité économique de Chaumont-sur-Aire

3.4.5 – Impact de la gare TGV sur l’urbanisation et l’activité économique

3.4.6 – Électricité

3.4.7 – La vie de Nicole et Bernard

3.4.8 – Bilan économique

3.4.9 – Poursuivre le mouvement – coûts d’investissementspublics

3.4.10 – Impact sur la géographie nationale

3.4.11 – Un mode très libéral et respectueux des volontés individuelles et collectives

Cette illustration sur base réelle démontrera qu’il suffirait de peu d’investissements publics pour amorcer un ré-équilibrage de population en faveur des zones peu denses, que ceci se traduira par une redynamisation de campagnes en perte de vitesse tout en leur conservant un caractère naturel pratiquement inchangé.

En termes de qualité de vie, ce sera très positif pour ceux qui font le choix de la campagne, sans rien sacrifier en termes de vie sociale (famille, amis), culturelle ou sportive.

On verra également que la multiplication de ces « districts NGV » permettra également une diminution sensible de la population des métropoles, ce qui permettra de les dé-densifier et gagner en qualité de vie.

Enfin on calculera le coût d’investissement pour la création d’autres districts-NGV et s’apercevra que celui-ci serait très supportable par les finances publiques et incomparablement moindre que des projets de rénovation urbaine dans les métropoles, tout en fournissant une solution pérenne et plus écologique.

3.4.1 – Présentation du contexte géographique

Nous sommes en 2035. Bernard et Nicole vivent à Chaumont-sur-Aire (Meuse).

En 2016, c’était une toute petite commune rurale de 133 habitants sur une surface de 9,9km2, soit un dixième de la surface totale de Paris (qui compte 2 millions d’habitants)

Au maximum de sa population (en 1841, donc il y a près de 2 siècles) elle comptait 541 habitants, soit 4 fois plus qu’en 2016.

Par chance, Chaumont-sur-Aire est à 7 km seulement de la gare Meuse-TGV. Paris est à 230km par la route et environ 50 à 60 minutes en NGV (navette grand vitesse), suivant la station d’arrêt (en 2016, le temps de trajet pour rejoindre la gare de l’Est, en plein Paris, était déjà de 55 minutes en TGV).

3.4.2 – la navette à grande vitesse

En 2022, l’État a enfin décidé d’avoir une politique dynamique d’aménagement du territoire. Il a demandé à la SNCF et à la RATP de collaborer pour concevoir une navette à grande vitesse (NGV), sous forme d’un métro automatique du style de la ligne 15, mais circulant à la vitesse d’un TGV.

Comme d’habitude les « décideurs », et en particulier les technocrates et les financiers, dirent que ce n’est pas possible, que ça coûtera cher, qu’il faudra absolument des conducteurs et que et que…

Le président de la République nouvellement élu sur une ligne politique à la fois écologiste, dynamique et entrepreneuriale, nomma une commission d’ingénieurs spécialistes des transports, d’automaticiens, de chercheurs-développeurs ayant déjà réalisé des projets réputés impossibles, afin de vérifier la consistance de ces craintes, qui lui apparaissent bien irrationnelles.

Comme il avait eu la sagesse de ne pas mettre de hauts fonctionnaires de Bercy (il avait préféré des hauts fonctionnaires du ministère de la Recherche et de l’Industrie, tout aussi capables méthodologiquement que leurs collègues du Budget mais bien plus habitués à calculer une rentabilité économique), la commission ne mit pas 6 mois pour rendre un avis enthousiaste et dès 2025 les premières NGV fonctionnaient déjà à une vitesse proche des TGV.

Dans la foulée, il décida de créer un « ring ferroviaire à grande vitesse » autour de Paris, sur une grande boucle passant par les nouvelles gares du Grand Paris Express (GPE) : Noisy-Champs, Saint-Denis-Pleyel, Nanterre, Versailles, aéroport d’Orly. Elle permettait donc une interconnexion rapide avec tous les quartiers de Paris et toute la zone dense de la Métropole du Grand Paris, via les nouvelles lignes du GPE et les 14 lignes du métro parisien (dont une grande part est prolongée ou en cours de prolongation jusqu’à ces gares d’interconnexion).

Ce ring fut construit en 4 ans et opérationnel en 2030. En effet, se rappelant que la première ligne de métro construite en 1898 avec des moyens rudimentaires n’avait demandé que 21 mois entre le premier coup de pioche et la mise en service, aucun technocrates n’osait plus indiquer qu’il fallait au moins 10 ans pour construire une ligne, comme c’était la norme vers les années 2010-2020.

3.4.3 – Impact sur l’urbanisation locale

Maintenant qu’il fallait moins d’une heure pour se rendre, soit au centre de Paris, soit dans une des gares d’interconnexion du GPE, et que la fréquence des navettes était de moins de 10 minutes (parfois 5, voire 2 minutes en périodes de pointe du matin et de la fin d’après-midi, en fonction de la demande qui est recalculée en temps réel), beaucoup de cadres, de professions intermédiaires et d’employés, surtout dans les domaines des services où le travail à distance est très aisé, avaient racheté des maisons anciennes, puis fait construire des maisons individuelle dans la verdure.

5 petites résidences arborées avec des petits immeubles de 3 niveaux avaient été construites à l’immédiate proximité sur les 8 rues sortantes de Chaumont-sur-Aire : chacune comptait une centaine de logements dont une grande part de 4-pièces et de 5-pièces vu que c’était surtout des familles jeunes avec 2-3 enfants.

500 logements avec 4 personnes en moyenne à l’immédiate périphérie, plus la population du centre ville qui était repassée à 540 habitants, Chaumont-sur-Aire comptait maintenant 2500 habitants dont près de 600 jeunes de moins de 20 ans.

Si on compare avec une petite ville de Banlieue comme Fresnes (7km au sud de Paris, 25 000 habitants, 3km2 hors autoroutes et surface commerciales), qui est pourtant une banlieue peu dense, la densité de Chaumont-sur-Aire est encore 30 fois moindre et on peut dire que la ville et ses environs restent très verts.

3.4.4 – Impact sur la vie locale et l’activité économique de Chaumont-sur-Aire

Tout d’abord Chaumont-sur-Aire a vu se créer une école maternelle et une école primaire. Le collège et le lycée sont à proximité de la gare TGV ce qui facilite la venue de certains professeurs parisiens, qui n’envisageaient pourtant guère qu’il existe une vie au-delà du périphérique.

D’autres services publics sont revenus (notamment un bureau de poste couplé avec des services municipaux).

L’agriculture locale s’est fortement développée avec beaucoup de maraîchage pour les consommateurs locaux. Il y a également quelques entreprises de bâtiment et d’artisanat (plomberie, électricité,…), et, bien sûr, une supérette bien achalandée avec des rayonnages de produits locaux.

Le café a ré-ouvert et un deuxième s’est installé pas très loin : ils proposent des menus simples et de bonne qualité avec beaucoup de produits locaux en agriculture « raisonnée » ou bio.

3.4.5 – Impact de la gare TGV sur l’urbanisation et l’activité économique de l’ensemble des communes avoisinantes (le district)

Le « district » de 10 km autour de la gare de Meuse-TGV représentent une surface totale de plus de 300 km2 soit 30 fois celle de Chaumont-sur-Aire. Toutes ces communes sont restées largement rurales et ont gagné en densité à peu près autant que Chaumont-sur-Aire, ce qui fait donc au total 75 000 habitants. Si on compte la petite ville qui s’est créée autour de la gare TGV et les impacts au-delà des 10 km, cela fait au total 100 000 habitants supplémentaires, alors que l’ensemble du département de la Meuse n’en comptait plus que 190 000 pour 6 000 km2 en 2016.

Bien évidemment tout ceci a profité à l’économie locale, tant sous l’angle agricole (accrooissement de la consommation locale) qu’industriel (production nationale, voire exportation)

Vu la proximité avec Paris (pour mémoire, une heure de trajet confortable) beaucoup de petites industries se sont développées à proximité de la gare TGV : ce sont souvent des entreprises très automatisées qui « ré-internalisent » leur production autrefois sous-traitée à l’étranger. Le surcoût de la main-d’oeuvre de production française est peu significatif au vu du haut niveau d’automatisation ; en revanche la grande proximité avec les centres de décisions des clients permet une grande réactivité de la production.

De plus il est très facile de faire venir des experts et des professionnels tant pour faire évoluer les lignes de fabrication que pour montrer aux clients les process de fabrication, puisque c’est « à la porte » de Paris et d’autres grandes villes sur la ligne TGV (Strasbourg, Reims, Nancy, Metz).

3.4.6 – Électricité

La plupart des bâtiments du district sont équipés de panneaux photovoltaïques et assurent une bonne part de la consommation d’électricité.

En pleine journée la production est même supérieure à la consommation et l’excédent d’électricité est utilisé pour produire un carburant à haute teneur en hydrogène (le méthane), lequel est ensuite réutilisé dans des piles à combustibles pour produire de l’électricité d’appoint (en fin de nuit surtout) ou directement pour le chauffage ou les automobiles.

3.4.7 – La vie de Nicole et Bernard

Avant de se marier avec Bernard, Nicole avait déjà une fille Elsa : celle-ci a maintenant 22 ans et termine ses études à Orsay où elle a une chambre d’étudiant.

Nicole et Bernard ont eu ensemble deux enfants : Mathieu (10 ans) et Marjorie (4 ans) qui vont donc à l’école communale.

Nicole travaille dans une compagnie d’assurances dont le siège est à La Défense. 3-4 jours par semaine elle travaille, avec trois autres collègues, dans un grand bureau à proximité de la gare Meuse-TGV et 1-2 fois par semaine elle se rend à La Défense pour des réunions de travail (plutôt une fois que deux, car beaucoup de réunions se font sous forme de téléconférences). Dans ce cas, elle prend une des nombreuses NGV (une tous les 5 minutes en matinée), change à la station Nanterre-la-Folie puis une station sur la ligne 15 l’emmène à la Défense : une heure et demi de bureau à bureau, dont une heure de navette TGV où elle peut travailler sur ses dossiers et répondre aux mails. De Chaumont-sur-Aire à son bureau local (7km), elle utilise son vélo à assistance électrique quand le temps n’est pas trop mauvais, sinon elle covoiture avec d’autres habitants de Chaumont-sur-Aire qui travaillent également à proximité de la gare de Meuse-TGV ou se rendent en région parisienne.

Bernard est en charge de la maintenance électronique des serveurs informatiques du district. Les réparations se font par échange standard de carte électronique, car tous les serveurs sont standardisés quelle que soit leur fonction et sont redondants (c’est-à-dire qu’ils peuvent fonctionner avec une seule carte sur les deux): à son arrivée il retire la carte signalée en erreur, insère une nouvelle carte, vérifie qu’elle s’active correctement, laisse une nouvelle carte de secours et remporte celle en erreur. Quant il passe a proximité de la gare de Meuse-TGV il dépose toutes les cartes en erreur et prend des cartes neuves ou réparées pour reconstituer son stock.

Comme la fiabilité des systèmes a été très améliorée via la standardisation, il a peu d’interventions de dépannage (en moyenne une à deux par jour pour les quelques milliers de serveurs informatiques du district) ce qui lui laisse beaucoup de temps en journée pour s’occuper des enfants, cultiver son potager et élever quelques poules.

Comme Bernard et Nicole, les autres habitants de Chaumont-sur-Aire bénéficient également de beaucoup de temps libre, le standard étant environ de 25 heures hebdomadaires. Du coup, la vie locale est très riche tant sur le plan sportif que culture et loisirs.

Assez souvent Bernard et Nicole vont en région parisienne pour visiter familles et amis ou aller au spectacle. Ils prennent généralement une navette aller vers 18h/19h et reviennent plus ou moins tard. Même de nuit, il y a des navettes toutes les 10 minutes et donc ils n’ont aucune contrainte horaire, sauf celle de dormir quand même quelques heures avant une nouvelle journée de travail.

3.4.8 – Bilan économique

En termes d’investissements publics, la plus grosse dépense fut la conception de ces navettes à grande vitesse, ainsi que la production des 30 rames (15 rames par heure dans chaque sens). Mais maintenant que la conception est opérationnelle elle pourra servir pour d’autres « districts » soit reliés à la Métropole du Grand Paris soit à d’autres métropoles régionales (Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux, Lille, Nantes, Limoges, Clermont-Ferrand…).

En face de cette dépense de quelques milliards, on a le relogement de 100 000 personnes qui non seulement réactivent des régions en perte de vitesse, mais également diminuent la pression foncière sur la région parisienne.

Quand on sait qu’un programme de rénovation urbaine avec création de 900 logements (soit 3 000 habitants environ) coûte 300 millions, on en déduit que pour 100 000 habitants cela correspondrait à 10 milliards rien que pour le volet logement.

Si on compte en plus les coûts indirects de transports (on ne pouvait pas continuer à densifier la banlieue parisienne sans créer de nouvelles lignes de métros et tramways), dont le coût est considérable en zone dense, on s’aperçoit que cette opération de relocalisation vers les campagnes fut extrêmement rentable pour les finances publiques.

De plus cela a redonné du dynamisme économique à des zones en perte de vitalité (donc des recettes fiscales) tout en diminuant les multiples inconvénients, sociaux et écologiques, de la densification des métropoles.

Le calcul rejoint la logique : plutôt que concentrer de plus en plus de population sur une part de plus en plus restreinte du territoire, il vaut bien mieux faire l’inverse. Tout le monde y gagne :

– les campagnes qui retrouvent vie et dynamisme

– les métropoles qui se dé-densifient un peu et gagnent en qualité de vie

3.4.9 – Poursuivre le mouvement – coûts d’investissement spublics

Dans l’exemple de Meuse-TGV on utilise une ligne TGV déjà existante sur une ligne encore peu chargée en trafic longue distance, mais si on veut généraliser le processus il faudra créer de nouvelles lignes.

Prenons l’hypothèse maximale qu’on n’utilisera aucune des lignes grandes distance pour faire circuler ces navettes à grande vitesse (on a vu que pour Chaumont-sur-Aire, qui a permis de tester le concept, on avait utilisé une voie TGV déjà existante).

Si on part sur l’hypothèse volontariste, de permettre à une vingtaine de millions d’habitants (soit 1/4 de la population française, puisque celle-ci devrait atteindre 76,3 millions en 2060) d’opter pour ce mode de vie plus calme et confortable, il faut donc créer de l’ordre de 200 « districts-NGV ». Si on les implante en moyenne à 100 km (dans de nombreuses régions peu denses on pourra abaisser l’espacement à 50 km), cela nécessite 20 000 km de lignes à grand vitesse (LGV).

Au milieu du XIXème siècle la France s’est dotée de 23 000 km de voies ferrées en seulement 30 ans, sans engins de terrassement ou de forage.

Le coût d’un km de LGV étant de 16 millions d’€, l’investissement sera de 160 milliards d’€. Sur 40 ans (ce qui sera déjà rapide en comparaison du rythme actuel de construction des lignes LGV, 2 600 km en 40 ans), cela ne représente que 8 milliards par an, ce qui n’est rien si on met en relation uniquement tous les avantages économiques et écologiques de l’opération.

Et encore ne chiffre-t-on pas les avantages humains qui seront considérables tant pour les zones sous-peuplées que pour les zones sur-peuplées ! (voir le thème 3.3 pour une liste plus complète de tous les bénéfices induits).

3.4.10 – Impact sur la géographie nationale

Chaque district-NGV correspondrait environ à 300 km2 soit pour les 200 districts une surface totale de 60 000 km2. Dit autrement, le projet ne vise qu’à densifier modérément (330 habitants au km2) sur seulement un dixième du territoire métropolitain.

C’est-à-dire qu’on ne touchera à aucun des grands espaces naturels actuels et aussi qu’on évitera les zones de haute montagne (plus difficiles d’accès et avec effets de pollution dans les vallées).

La densification des districts sera assez modérée puisque une densité de 330 habitants au km2 est analogue à celles d’autres pays ou régions pourtant très verts tout en conservant d’importantes zones agricoles et boisées au sein-même de ces districts : la densité moyenne du département des Yvelines est de 627 hab/km2 et celui l’Essonne de 714 hab/km2, autrement dit ces districts seront moitié moins denses que des départements franciliens parmi les plus verts.

Et ils n’occuperont qu’un dixième de la surface nationale !

1.4.11 – Un mode très libéral et respectueux des volontés individuelles et collectives

Nous avons fait les hypothèses de coûts d’un investissement sur la base de 20 millions d’habitants, soit ¼ seulement des habitants de notre pays, alors que 80% des cadres franciliens disent vouloir quitter la capitale.

Il s’agit donc pour la puissance publique uniquement de réaliser des investissements publics (très rentables, revoir le dernier chapitre du thème 1.2.volet gauche), sans s’occuper en rien de savoir qui ira habiter où et pourquoi : tout ce volet sera confié au privé sur la base des volontés individuelles des citoyens.

Il ne s’agit absolument pas de refaire des villes nouvelles sur les bases technocratiques des années 60 et encore moins l’urbanisation à la Ceausescu.

Bien sûr, la puissance publique vérifiera que les constructions s’opèrent dans des zones sûres, qu’elles respectent la nature et ne défigurent pas le paysage, comme elle le fait actuellement pour tout projet. Mais pas plus.

Les « pays » d’accueil seront également associés afin que les lignes de train comme les gares d’arrêts soient décidés en associant étroitement les habitants. On pourrait prévoir des referendums locaux et commencer par les districts qui sont les plus majoritairement favorables.

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